Les États-Unis se préparent à l’arrivée menaçante des ordinateurs quantiques

N’oublions pas que les États-Unis veulent s’imposer en leader du quantique, une position menacée par la Chine ; même chose pour l’intelligence artificielle.

Le président Joe Biden a signé le 4 mai 2022 un mémorandum sur la sécurité nationale consacré à l’informatique quantique. Au-delà des aspirations américaines à dominer ce champ technologique plein de promesses, le texte reflète l’inquiétude des États-Unis à voir surgir un ordinateur capable de casser tous les systèmes cryptographiques actuellement utilisés.

La vulnérabilité de la cryptographie américaine face aux perspectives de l’informatique quantique

Avec ce texte le président américain vise à « stimuler les innovations dans l’ensemble de l’économie américaine, de l’énergie à la médecine, grâce à des avancées en matière de calcul, de mise en réseau et de détection ». Il martèle que les États-Unis doivent conserver leur leadership dans « la science de l’informatique quantique » en promouvant les coopérations entre le secteur public, les entreprises privées et la recherche.

C’est toutefois la sécurité des systèmes informatiques américains qui occupe une place prépondérante du mémorandum. Dans un communiqué diffusé en parallèle, le directeur de la National Security Agency (NSA), Paul Nakasone, explique qu’un « ordinateur quantique pertinent sur le plan cryptographique pourrait mettre en péril les communications civiles et militaires, ainsi que les systèmes de surveillance et de contrôle des infrastructures critiques ».

Une perspective « pas si lointaine » à en croire « les recherches actuelles » selon les propos d’un haut fonctionnaire américain relayé par The Record. Les systèmes cryptographiques américains fonctionnent selon des principes établis à la fin des années 70 et constamment mis à jour depuis.

Les perspectives de l’informatique quantique pourraient remettre en cause l’efficacité de ces systèmes cryptographiques. Pour anticiper ce risque, prévu à l’horizon 2030 selon un rapport remis au Congrès américain et relayé par The Register, l’administration Biden prend un certain nombre de mesures.

Sous 90 jours à un an, le National Institute of Standards and Technology (NIST) doit publier de nouvelles normes cryptographiques pour préserver les systèmes américains de ce danger. Le NIST, la NSA, la Cybersecurity and Infrastructure Security Agency (CISA) auront chacun un certain nombre de missions pour mettre à niveau la cryptographie américaine.

L’ordinateur quantique : une course technologique internationale

Le même jour Joe Biden a signé un décret pour créer un Comité consultatif sur l’initiative quantique nationale. Composés de représentants de l’administration et de 26 experts venus de l’industrie, des universités et laboratoires fédéraux, il aura pour tâche d’informer le grand public et Washington, de fournir des analyses, conseillers, réfléchir aux applications du quantique.

Ce décret s’appuie sur la loi sur l’initiative quantique nationale de Donald Trump, de 2018. Un plan de 1,2 milliard de dollars (1,1 milliard d’euros) pour faire progresser les technologies quantiques aux États-Unis. Les USA sont engagés dans une course à la suprématie dans ce secteur stratégique avec la Chine. Les chercheurs de l’Empire du Milieu ne cessent de revendiquer de nouveaux progrès dans le secteur.

En France, Emmanuel Macron a affiché en 2021 l’ambition de faire de l’hexagone le troisième grand pays quantique aux côtés des géants américains et chinois. Le président de la République a mis en place une feuille de route sur les cinq prochaines années pour développer des technologies quantiques. 1,8 milliard d’euros ont été dédiés à ce projet. La course est lancée.

Les USA veulent (aussi) bloquer la Chine sur l’ordinateur quantique

Dans une course à la suprématie quantique, face aux groupes américains comme IBM qui avancent publiquement, les industriels chinois progressent dans l’ombre. Et les USA semblent décider à arrêter de partager leur technologie avec la Chine pour le pas leur laisser l’avantage.

La situation

Après les smartphones, les puces et microprocesseurs de hautes performances  et les ordinateurs classiques, les Américains entendent aussi ne plus partager de savoir-faire avec la Chine en matière de quantique. C’est ce que rapportent plusieurs reporters de Bloomberg : dans ce domaine aussi, l’heure de la fin des échanges a sonné. Le gouvernement des USA étudie en effet des mesures de restriction de produits, logiciels et technologies clés dans le développement des ordinateurs quantiques, un domaine dans lequel la Chine est suspectée d’avancer très vite. Pour l’heure à l’état de rumeur, ce projet n’aurait pas autant de poids dans les discussion s’il ne s’inscrivait pas dans un plan qui semble méthodique. Face à une menace qui est de plus en plus réelle.

L’assaut technologique américain a débuté sous l’ère Trump, dont le gouvernement de l’époque avait défait Huawei. Devenue numéro 1 mondial des smartphones, le numéro 2 mondial de la r&d avait perdu en quelques semaines l’accès aux usines taïwanaises de TSMC pour produire ses puces, ainsi que l’accès aux Google Mobile Services. Un coup qui a fait plonger les parts de marché de Huawei en téléphonie dans les limbes. Le second coup, plus large et qui est en cours, est de méthodiquement bloquer à l’export, une à une, les technologies américaines. Qu’ils s’agissent d’acteurs américains, comme Applied Materials ou Cadence, que d’acteurs étrangers comme le néerlandais ASML. Comme ses machines de lithographie EUV intègrent des composantes américaines, le gouvernement US a pu faire pression sur son homologue néerlandais ainsi que sur ASML pour interdire l’export de ces précieux « scanners ». Et a récemment demandé à ses ressortissants installés sur le territoire chinois, cadres ou hauts cadres de l’industrie des semi-conducteurs, de faire un choix de nationalité et de rentrer au pays. Sous peine de perdre leur nationalité. Un coup qui a mis à l’arrêt de nombreux sites de production du jour au lendemain.

Toujours balbutiante et pas encore très structurée – mis à part chez quelques acteurs comme IBM–, l’industrie quantique est moins facile à cerner. Plusieurs technologies sont toujours en compétition – supraconducteurs, ions piégés, effet de spin, etc. – et il reste de nombreux progrès à faire. Que ce soit dans le domaine des processeurs et semi-conducteurs – IBM, mais aussi Google, Intel ou encore Microsoft y travaillent – mais aussi en matière de matériaux et de logiciels. De plus, contrairement aux semi-conducteurs ou la puissance américaine est énorme en matière de propriété intellectuelle, le savoir-faire est plus distribué en matière de quantique, l’Europe ayant par exemple un poids plus important. Les officiels américains seraient donc en train de faire l’état des lieux de ce qu’il serait possible et souhaitable de bloquer. Car même si la tâche s’avère difficile, le risque est réel.

Quantique : une menace certaine, une Chine dans l’obscurité

Pas besoin de faire un cours du fonctionnement de l’ordinateur quantique pour mesure les possibilités – et les menaces qu’il représente. Pour l’heure toujours limité à des puissances très modestes de quelques dizaines à très bientôt quelques centaines de qbits, l’ordinateur quantique en est encore à ses balbutiements. Mais certains seuils de puissance – à priori au-delà de centaines de milliers de qbits – sa puissance pour révolutionner l’informatique.

Car sa puissance théorique dans des problèmes spécifiques va tout accélérer de manière ahurissante, faisant passer des centaines de milliers d’années de temps de supercalculateur à quelques heures, voire minutes. Idéal pour trouver de nouveaux matériaux, de nouvelles molécules, etc. Mais aussi pour faire voler en éclat toutes les protections numériques. Notamment celles des communications… privées comme gouvernementales et militaires.

Et dans ce domaine, la Chine fait peur, autant par ses annonces que par l’opacité de la manière dont sont menées les recherches. D’une part, les recherches de l’Empire du milieu se font à huis clos – le gouvernement est derrière tous les investissements. Ensuite, le pays a affirmé, à plusieurs reprises, sa supériorité quantique. S’il n’a jamais invité des experts étrangers pour échanger et partager ses recherches, le pays a cependant déployé le premier réseau de communications sécurisées par échange de clés quantiques. Un réseau qui relie plusieurs villes et fait appel à une composante spatiale – un satellite en lien optique avec le réseau.

Après avoir menacé, enlevé les gants puis frappé au corps avec les récentes annonces, le gouvernement américain semble bien parti pour rentrer en guerre technologique totale avec la Chine. Une guerre qui devrait moins lui coûter que celles des semi-conducteurs – chacun de ses blocages fait perdre des contrats à ses entreprises. Mais avec une portée long terme non négligeable : le premier à maîtriser cet outil aura un avantage décisif si l’autre n’a pas pris les bonnes mesures de protection. Avec des conséquences potentiellement catastrophiques pour le ou les retardataires.

Source : Les USA veulent (aussi) bloquer la Chine sur l’ordinateur quantique
Publié sur 01Net le lundi 21 octobre 2022

Cet article est une traduction de : US Eyes Expanding China Tech Ban to Quantum Computing and AI
Publié sur Bloomberg le 20 octobre 2022

Les États-Unis ont-ils enterré la capacité à innover de la Chine ?

Malgré l’annonce par Washington d’une restriction drastique de ses exportations de puces électroniques vers la Chine, Xi Jinping a de nouveau confirmé, à l’occasion du XXe Congrès du Parti communiste chinois, son intention de faire de son pays le leader mondial en matière d’intelligence artificielle d’ici à 2030. Mais ses espoirs d’y parvenir pourraient être douchés sur le long terme… tout comme ceux des États-Unis.

Explications

C’est le point culminant des tensions commerciales et technologiques qui divisent la Chine et les États-Unis depuis plusieurs décennies. Le 7 octobre, l’administration Biden a présenté les mesures les plus drastiques prises à ce jour pour limiter l’accès de la Chine au marché des puces informatiques, affirmant que cette technologie contribue à la modernisation militaire du pays et au développement d’armes de destruction massive, menaçant la sécurité du territoire américain. Parmi les nouvelles règles, le Bureau du commerce des États-Unis impose aux entreprises américaines de cesser de fournir aux fabricants chinois des semi-conducteurs ( ce matériau nécessaire au fonctionnement de toute technologie, des téléphones portables aux ordinateurs, en passant par l’électroménager et l’automobile, ndlr). À moins qu’ils n’obtiennent une dérogation préalable, les principaux concepteurs américains de semi-conducteurs, tels que Nvidia et AMD, ne peuvent plus vendre à la Chine leurs puces haut de gamme, essentielles à la conception de technologies d’intelligence artificielle (IA) et de superordinateurs. Par ailleurs, les citoyens américains et détenteurs de la carte verte ont interdiction de travailler pour des entreprises et entités chinoises sur certaines de leurs technologies.

Ces règles draconiennes s’ajoutent à la longue liste des restrictions initiées par l’ancien président américain Donald Trump, qui avait notamment imposé un embargo sur le mastodonte des télécoms Huawei, accusé d’espionnage pour le compte de Pékin. Cette décision est un nouveau coup dur pour la Chine, qui vient tout juste de célébrer le vingtième Congrès du Parti communiste chinois (PCC). « La décision de l’administration Biden d’infliger ces sanctions à la veille de l’ouverture de ce congrès, qui est l’événement le plus paroxysmal de la politique chinoise, est une claire illustration de la rivalité sino-américaine sur le sujet des technologies », décrypte Emmanuel Véron, docteur en géographie et spécialiste de la Chine contemporaine.

En effet, les deux pays se livrent une bataille technologique sans merci pour détenir le leadership en matière d’innovation qui leur assurerait la première place dans « cette nouvelle ère de compétition » qu’est l’IA, selon la Commission de sécurité nationale sur l’intelligence artificielle des États-Unis. Dans ce contexte, l’interdiction des puces traduit une « escalade massive » qui devrait aussi bien affecter l’industrie des semi-conducteurs que les innovations chinoises, notamment dans le domaine de l’IA. « Nous essayons tous encore de comprendre les impacts des nouveaux contrôles et, franchement, je pense que beaucoup sous-estiment leur importance, tant pour les chaînes d’approvisionnement en technologie et les développements futurs que, plus largement, pour les relations entre les États-Unis et la Chine », avance Bill Bishop, analyste chevronné de la Chine, dans sa newsletter Sinocism.

Un frein aux innovations chinoises

À court terme, ces nouvelles mesures devraient freiner la capacité d’export des semi-conducteurs vers la Chine, engendrant des répercussions internationales en termes de disponibilité des puces électroniques. L’absence d’équipement américain devrait également entraver l’industrie naissante de la fabrication de semi-conducteurs made in China. « C’est un coup infligé aux programmes du régime chinois, qui a massivement investi dans ces technologies pour pouvoir entrer en concurrence avec les fabrications taïwanaises et coréennes – qui constituent 70 à 80 % de ses importations de semi-conducteurs – et avec les fabrications américaines », nous explique Emmanuel Véron. La part de la Chine sur le marché mondial des semi-conducteurs, passée de 9 % en 2011 à 16 % en 2021, devrait donc stagner dans les années à venir.

La suite de ce magnifique article : Les États-Unis ont-ils enterré la capacité à innover de la Chine ?
Publié sur Usbek & Rica le 22 octobre 2022 par Emilie Echaroux

L’algorithme de BlueQubit sélectionné par la DARPA

L’algorithme de BlueQubit a été choisi par la DARPA

 

La DARPA sélectionne BlueQubit Inc. pour développer l’IA quantique.

BlueQubit Inc a été choisie pour un projet de l’Agence de Projets de Recherche Avancée pour la Défense (DARPA) sous le programme IMPAQT. Cette reconnaissance met l’accent sur le développement des algorithmes de l’IA quantique pour les dispositifs quantiques imparfaits de type « Noisy Intermediate Scale Quantum » (NISQ).

BlueQubit Inc. développe des algorithmes hybrides pour surmonter les limites classiques.

Ce projet est d’une grande importance étant donné les limites des ordinateurs classiques dans des domaines tels que la cybersécurité en défense et la formation de grands modèles d’IA. Avec l’avènement du matériel quantique qui possède plus de 100 qubits et 10,000 portes à deux-qubits, de nouvelles solutions sont à l’horizon et BlueQubit Inc. se concentre sur l’exploration de ces nouvelles possibilités avec le développement de ses algorithmes hybrides quantiques-classiques.

Collaboration entre BlueQubit Inc. et QuEra.

En partenariat avec QuEra, un acteur de l’informatique quantique, BlueQubit Inc. travaille sur les ordinateurs quantiques à atomes neutres..