Maths au quotidien : l’hôtel infini, voyage dans un paradoxe

Juste pour le plaisir de l’esprit …

Soyons fous cette année pour les vacances, ouvrons un hôtel infini. Oui, vous avez bien lu, un hôtel hypothétique avec une infinité dénombrable de chambres. Un ensemble infini est dit dénombrable, lorsque ses éléments peuvent être listés sans omission ni répétition dans une suite indexée par les entiers. Dès lors on peut numéroter les chambres : chambre 1, chambre 2, et ce jusqu’à l’infini. Chaque chambre accueille un seul voyageur.

Quel serait l’avantage de cet hôtel novateur ?

Imaginons que chaque chambre de notre hôtel infini est déjà occupée, l’hôtel est complet ! Un nouveau voyageur se présente à l’accueil et souhaite obtenir une chambre. Mauvaise nouvelle ? Non ! Les propriétés de l’infini vont nous permettre de lui en trouver une. Mais comment procéder ? Le standardiste a une idée. Il frappe à la chambre 1 et demande à son occupant d’aller s’installer dans la chambre 2, ensuite il demande à l’occupant de la chambre 2 de s’installer dans la 3 et ainsi de suite. Chaque client déménage de la chambre N vers la chambre N+1 et, comme il y a un nombre infini de chambres, il y a une nouvelle chambre pour chaque client. Après ce long procédé, le standardiste, infatigable, indique au voyageur que la première chambre est à présent libre pour la nuit, il ne reste qu’à mettre des draps propres pour tout le monde et bonne nuit.

Cet hôtel remarquable permet également de loger les voyageurs de tout un bus alors que l’hôtel est déjà complet. Supposons qu’un bus contenant 20 nouveaux voyageurs arrive. Le standardiste génial utilise la même idée et demande cette fois à l’occupant de la chambre 1 de déménager vers la chambre 21, à l’occupant de la chambre 2 de déménager vers la 22 et ainsi de suite. Chaque client déménage de la chambre N vers la chambre N+20 et le problème est résolu : les 20 voyageurs du bus s’installent chacun dans une des 20 premières chambres qui sont à présent vides. Ce procédé fonctionne quel que soit le nombre fini de voyageurs qui se présentent. Fantastique, mais il est fort probable qu’on vous demande de bouger plusieurs fois pendant la nuit.

A présent, imaginons que c’est un bus infini, rempli d’un nombre infini dénombrable de voyageurs (voyageur 1, voyageur 2…) qui arrive à notre hôtel qui est complet. Notre fidèle standardiste, d’abord perplexe, trouve rapidement comment loger cette infinité de nouveaux voyageurs !

Et vous ?

Il faut pour cela libérer un nombre infini de chambres, par exemple toutes les chambres impaires. Notre standardiste demande donc au client de la chambre 1 de déménager vers la chambre 2, au client de la chambre 2 de déménager vers la 4, à celui de la chambre 3 de déménager vers la 6 et ainsi de suite. Cette fois, le client de la chambre N déménage vers la chambre 2N. Les chambres paires sont à présent toutes occupées, laissant toutes les chambres impaires libres pour accueillir les nouveaux voyageurs. Tout le monde est content, mis à part peut-être le personnel de l’hôtel qui décidément n’arrête jamais de changer les draps.

Notre hôtel infini se taille une sacrée réputation, car il y a toujours de la place, quel que soit le nombre de personnes qui se présentent.

Il est possible de pousser l’expérience encore plus loin en imaginant qu’un nombre infini dénombrable de bus, chacun transportant un nombre infini dénombrable de voyageurs, arrivent à notre hôtel, toujours complet. Le standardiste peut à nouveau compter sur les mathématiques pour l’aider, en faisant appel à l’infinité des nombres premiers. Les nombres premiers sont des nombres naturels qui ont exactement deux diviseurs : 1 et eux-mêmes. Par exemple : 2, 3, 5… L’infinité dénombrable des nombres premiers fut démontrée par Euclide au 4e siècle avant Jesus-Christ. Il se base sur ce résultat pour libérer un nombre infini de chambres pouvant accueillir le nombre infini de clients, venant d’un nombre infini de bus infinis.

Les clients de l’hôtel vont déménager vers les chambres dont les numéros sont les exposants de 2 (premier nombre premier). Par exemple, le client de la chambre 5 ira dans la chambre 25 (=32). Le client de la chambre N déménage donc vers la chambre 2N. Passons ensuite au premier bus infini dont les clients seront envoyés vers les chambres numérotées par les exposants de 3 (deuxième nombre premier). Le voyageur du siège 5 du premier bus dormira dans la chambre 35 (=243). Et ainsi de suite pour l’infinité de clients de l’infinité de bus ; le client N du 2e bus dormira dans la chambre 5N, le client N du 3e bus dormira dans la chambre 7N. Comme nous utilisons les exposants des nombres premiers, il n’y a pas de répétition des numéros de chambres et chaque client peut dormir tranquillement. Notons qu’il reste une infinité de chambres vides, celles qui ne sont pas des exposants de premiers, par exemple la 6e chambre.

Malgré le travail logistique colossal que cet hôtel demande, ces expériences ne sont possibles que parce que nous travaillons avec l’infini et en particulier sa plus petite version, que l’on appelle « infini dénombrable », concept que nous avons utilisé tout le long en comptant les chambres, les bus, les clients… Par contre si un hôtel fini, aussi grand soit-il, est complet il est impossible de rajouter le moindre voyageur.

Notre hôtel infini, souvent appelé Hôtel de Hilbert, est une expérience théorique pensée par le mathématicien David Hilbert (1862-1943) qui illustre le paradoxe éponyme décrivant les propriétés contre-intuitives des ensembles infinis.

Cette expérience de pensée illustre surtout les problèmes que nous avons à gérer l’infini, en nous forçant à abandonner nos habitudes de dénombrement dans les ensembles finis.

Article source : L’hôtel infini, voyage dans un paradoxe
Publié sur TheConversation le 13 août 2020

Mathématiques : des infinis multiples et de taille différente

Autre article pour le plaisir …

Révolution dans les mathématiques ! À la fin du 19e siècle, Georg Cantor démontre que les réels ne sont pas dénombrables, ouvrant ainsi la voie à une infinité d’infinis

Savez-vous compter ?

La question peut paraître un tantinet impertinente…
Mais vous êtes-vous déjà demandé ce que signifie réellement le mot « compter » ou son synonyme « dénombrer » ? Pour essayer d’avancer sur cette question, souvenons-nous de nos premiers comptages : par exemple, pour connaître le nombre de lettres du mot AIMER, nous avons énuméré celles-ci en levant successivement les doigts : la lettre A correspond au pouce, le I à l’index, le M au majeur, le E à l’annulaire et enfin le R à l’auriculaire. Nous avons appris que si notre algorithme se terminait par l’auriculaire, la quantité recherchée était égale à cinq.

Ce protocole que nous avons pratiqué dès notre plus jeune âge dissimule sous son apparente simplicité une riche notion mathématique : il y a autant de lettres dans le mot AIMER que de doigts sur une main, puisque l’on peut faire correspondre à chaque lettre un doigt différent et que chaque doigt est associé à une lettre ; chaque élément d’un ensemble est associé à un et un seul élément de l’autre ensemble. Une correspondance qui vérifie cette propriété est qualifiée de biunivoque ou, plus simplement, appelée bijection. Si vous exhibez une bijection entre deux ensembles – ce que vous faites en permanence sans même vous en rendre compte -, c’est qu’ils ont le même nombre d’éléments : enfiler ses chaussures, c’est réaliser une bijection entre l’ensemble de ses chaussures et l’ensemble de ses pieds ! Le nombre commun d’éléments de ces ensembles est deux. Ce concept de bijection, s’il peut sembler bien compliqué pour dénombrer des ensembles de la vie quotidienne, s’est avéré essentiel pour comprendre l’infini.

Un ensemble inclus dans un autre n’est pas forcément plus petit !

Car qu’est-ce qu’un ensemble infini ? Simplement un ensemble tel que l’énumération de ses éléments par les entiers ne se termine jamais. Les nombres fournissent naturellement de telles collections : l’ensemble de tous les entiers naturels, celui des nombres rationnels (pouvant s’écrire comme des fractions d’entiers), celui des nombres réels (pouvant s’écrire intuitivement comme un entier suivi de décimales)… Historiquement, au début du 19e siècle, c’est d’ailleurs avec l’utilisation de nombres réels pour l’étude des fonctions continues qu’apparaît le besoin de préciser le recours à des ensembles infinis. Mais comment définir et manipuler ces derniers ? C’est en 1873 qu’un premier résultat important apparaît, dans la correspondance entre deux mathématiciens allemands motivés par ces questions : l’analyste Georg Cantor (1845-1918), aujourd’hui reconnu comme le fondateur de la théorie des ensembles, et l’algébriste Richard Dedekind (1831-1916). Et c’est un coup de tonnerre : il n’y a pas un infini, mais des infinis ! Ce que l’on appelle « l’infini » recouvre en fait des situations bien distinctes. Cantor montre en effet qu’il ne peut y avoir de bijection entre l’ensemble des entiers et l’ensemble de toutes les parties composées d’entiers (cet ensemble comprend la partie contenant les trois entiers 1, 3 et 37, celle des entiers pairs, celle des impairs, etc.) ; or, comme on l’a vu, la bijection est l’outil qui permet de dire que deux ensembles ont le même nombre d’éléments. Ainsi, bien qu’ils soient tous les deux infinis, ces ensembles n’ont pas le même nombre d’éléments ou, dans le langage de l’époque, la même puissance ; leur infinité n’est pas la même.

Dès lors, on peut chercher parmi les ensembles infinis ceux qui peuvent être mis en bijection. En trouver est facile : les ensembles des pairs, des entiers plus grands que 37, ou encore des nombres premiers ont tous la même puissance ; on les appelle ensembles dénombrables, car on peut « compter » leurs éléments avec tous les nombres entiers. Plus surprenant, l’ensemble des nombres rationnels est lui aussi dénombrable ; il y a donc « autant » de rationnels que de nombres entiers, même si l’un de ces ensembles inclut l’autre. L’idée semble défier la raison : qu’un ensemble soit inclus dans un autre ne signifie pas qu’il est « plus petit » ! Avec des ensembles finis, on pouvait tenir le raisonnement suivant : « L’ensemble des voyelles est inclus dans l’ensemble des lettres donc il y a moins de voyelles que de lettres » ; ce « donc » n’est plus correct avec des ensembles infinis.

Des nombres que l’on ne peut définir par une phrase en français

Voici quelques autres ensembles dénombrables : l’ensemble des nombres réels algébriques, c’est-à- dire qui sont solution d’une équation algébrique à coefficients entiers (comme les rationnels mais aussi √2, ou le nombre d’or) ; ou, plus étonnant, l’ensemble des réels que l’on peut définir par une phrase en français, ou l’ensemble des réels que l’on peut calculer par un programme informatique. Vous pourriez penser, à partir de tels exemples, que tous les ensembles de nombres ont la même puissance. Erreur ! L’argument de Cantor en 1873 permet de montrer simplement que l’ensemble de tous les réels n’est pas dénombrable. Arrêtons-nous un instant sur ce fait : si l’ensemble des réels et l’ensemble des algébriques n’ont pas la même puissance, ils ne peuvent être égaux. Donc il existe des nombres réels qui ne sont pas algébriques (on les appelle transcendants, et ils comptent dans leur rang des célébrités comme π ou la constante e de l’exponentielle). Cette information n’est pas nouvelle, mais la simplicité de cette preuve, qui établit l’existence de ces nombres sans exhiber l’un d’entre eux, est confondante. Si vous avez bien suivi l’argument précédent, vous voyez déjà d’autres résultats contre-intuitifs : il existe des réels que l’on ne peut pas définir par une phrase en français et des réels que l’on ne peut pas calculer informatiquement !

Pendant les premières années qui suivent la découverte de Cantor, on repère aussi des ensembles de même cardinalité, mais non dénombrables : un segment avec le même segment privé d’un point (enlever un point à un trait ne change pas sa cardinalité), une ligne avec une surface…

Aleph, une nouvelle notation pour écrire les infinis

Ces résultats frappent les esprits, et même le découvreur avoue son incrédulité dans ses lettres : « Ce que je vous ai communiqué tout récemment est pour moi-même si inattendu, si nouveau, que je ne pourrai pour ainsi dire pas arriver à une certaine tranquillité d’esprit avant que je n’aie reçu, très honoré collègue, votre jugement sur son exactitude. Tant que vous ne m’aurez pas approuvé, je ne puis que dire : Je le vois mais ne le crois pas.  » Dedekind va confirmer la validité de l’argument, et celui-ci va se diffuser progressivement dans la communauté mathématique. Comme le dit le mathématicien français Henri Poincaré en 1902 dans un article intitulé « Les fondements de la géométrie » : « Notre façon de concevoir l’infini s’est […] modifiée. M. G. Cantor nous a appris à distinguer des degrés dans l’infini lui-même ».

Pour écrire de façon commode ces différents infinis, Cantor imagine de noter א0 (aleph 0) le cardinal des dénombrables, א1 celui des réels, etc. Toutefois, il ne se limite pas à cette première distinction entre ensembles infinis (qu’il appelle d’ailleurs transfinis, tant il se méfie des sens attachés au mot « infini »). Alors que dans un premier temps, il avait considéré le cardinal des ensembles, c’est-à-dire leur nombre d’éléments, il imagine dans un second temps de regarder le rang d’un ensemble dans une énumération d’ensembles inclus les uns dans les autres, du plus petit vers les plus grands : pour le dire naïvement, il passe de la suite « un, deux, trois… » (on compte les éléments pour obtenir le cardinal) à la suite « premier, deuxième, troisième… » (on détermine le rang dans l’énumération). Si l’on reprend l’exemple des doigts de la main, de cardinal 5, cette détermination du rang permet de préciser leur position : à partir du pouce, 0, l’auriculaire correspond au rang 4, ce que Cantor appelle ordinal 4. Cela peut sembler anodin, voire inutile, mais, avec ce changement conceptuel, on gagne en précision et en finesse car l’on peut désormais distinguer des ensembles qui ont le même cardinal.

Au-delà des entiers naturels, les ordinaux transfinis

Cantor élabore ainsi une collection d’ensembles de référence appelés ordinaux telle que tout ordinal appartient aux ordinaux plus grands que lui, les ordinaux finis correspondant aux entiers naturels. La collection des ordinaux transfinis apparaît donc comme un prolongement de la suite ordonnée des entiers naturels. Après l’ordinal correspondant à 0, puis celui correspondant à 1, et ainsi de suite pour tous les entiers naturels, le premier ordinal transfini que l’on aperçoit dispose d’une notation propre, ω : c’est le plus petit ordinal plus grand que les entiers et donc le plus petit objet infini.

Les ordinaux ont joué un rôle important dans la compréhension des fondements des mathématiques, mais ils ne présentent pas qu’un intérêt théorique. Ils peuvent par exemple être l’objets d’opérations arithmétiques (l’addition, la multiplication et l’exponentiation). On peut aussi calculer des ordinaux comme ω+ ω, ω² ou même ωω. Si l’on additionne ou multiplie deux ordinaux correspondant à des entiers, le résultat sera l’ordinal qui correspond à la somme ou au produit de ces entiers.

Cette arithmétique des ordinaux permet de dépasser l’incrédulité et les doutes des contemporains de Cantor et d’obtenir de nouveaux théorèmes. Par exemple, certains résultats sur les entiers, sans lien a priori avec l’infini, ne sont pas démontrables en restant dans le cadre théorique des entiers, mais on peut les établir en passant par l’ensemble, plus grand, des ordinaux. Le plus fascinant concerne ce qu’on appelle les suites récurrentes de Goodstein, des suites d’entiers qui semblent en apparence croître extrêmement rapidement (si l’on commence le calcul avec la modeste valeur 19, les termes suivants comportent 17 chiffres, 155 chiffres, 2185 chiffres, et plus de 15 millions à la septième étape !). Dans le cadre ordinaire de l’arithmétique, il est établi qu’on ne peut déterminer leur comportement asymptotique, alors qu’en passant par les ordinaux, on parvient facilement à montrer qu’elles stationnent à la valeur 0. Le calcul par les ordinaux s’avère donc plus fécond que le calcul par les entiers, même pour établir des résultats qui ne les font pas intervenir. De telles considérations confortent l’affirmation d’Henri Poincaré dans son ouvrage Science et méthode : « Pour enseigner l’arithmétique d’une façon vraiment logique, on devrait commencer par établir les propriétés générales des nombres cardinaux transfinis, puis distinguer parmi eux une toute petite classe, celle des nombres entiers ordinaires. » Il se reprend toutefois quelques lignes plus loin : « Cette méthode est évidemment contraire à toute saine psychologie. » Ouf, vous n’aurez pas à connaître l’infini pour savoir compter dans la vie de tous les jours !

La diagonale de Cantor : le réel… en plus

Georg Cantor a fourni plusieurs preuves pour établir que des ensembles n’étaient pas en bijection. L’une d’entre elles est désormais connue sous le nom d’argument de la diagonale. Supposons par l’absurde qu’il existe une bijection entre l’ensemble des entiers naturels et les réels entre 0 et 1, c’est-à-dire que l’on peut énumérer tous les réels entre 0 et 1. À partir de cette énumération, construisons un tableau (avec une infinité de lignes et de colonnes) : dans la première ligne, disposons les décimales (une par case) du premier réel, dans la deuxième celles du deuxième réel… Définissons désormais un réel x entre 0 et 1 en fixant l’une après l’autre ses décimales. Si la première décimale dans la première ligne est un 1, on fixe la première décimale de x à 0, sinon on la fixe à 1 ; si la deuxième décimale dans la deuxième ligne est un 1, on fixe la deuxième décimale de x à 0, sinon on la fixe à 1. En poursuivant ainsi, on définit entièrement x, et ce réel n’apparaît pas dans ce tableau car il diffère de chaque réel qui s’y trouve au moins sur la décimale de la diagonale du tableau. On a ainsi exhibé un réel qui n’est pas dans l’énumération, ce qui contredit le caractère bijectif de celle-ci ! En conclusion, il n’y a pas de bijection entre les entiers naturels et l’intervalle ]0,1[. Ce qui entraîne qu’il n’y a pas de bijection entre N et R.

L’hôtel (très) particulier de Hilbert

On attribue à David Hilbert un joli exemple pour familiariser le public avec les ensembles dénombrables. Imaginons un hôtel qui dispose d’une infinité de chambres numérotées avec les entiers (il y a une chambre 0, une chambre 1… et ainsi de suite). Si toutes les chambres sont occupées et qu’un nouveau client arrive, le réceptionniste peut tout de même le loger : il suffit de dire à chaque client déjà présent de libérer sa chambre et d’occuper la suivante puis de mettre l’arrivant dans la chambre 0, désormais libre. Tous les clients, l’arrivant comme ceux déjà présents, disposent d’une chambre et il n’y a pas de chambre avec plusieurs clients. On a illustré ici que si on rajoute un élément à un ensemble dénombrable (l’ensemble des clients déjà logés), on obtient encore un ensemble dénombrable : la bijection fait correspondre un client au numéro de sa chambre. Si maintenant, vous disposez de deux tels hôtels infinis, il est possible de reloger tous les clients du second dans le premier sans pour autant expulser un seul client de celui-ci : à vous de trouver le protocole !

Article : Des infinis multiples et de taille différente
Publié sur Science & Avenir le 15/08/2020 par Roger Mansuy

Sun Tzu et l’Armée : Les Dix Commandements d’une Gouvernance de Crise

L’Art de Conduire les Hommes face au Péril

Sun Tzu ou Sun Tse ou Sun Zi ou encore Souen Tseu est un général chinois du VIe siècle av. J.-C. (544-496 av. J.-C.).

Il est surtout célèbre en tant qu’auteur de l’ouvrage de stratégie militaire le plus ancien connu : L’Art de la guerre. L’idée principale de son œuvre est que l’objectif de la guerre est de contraindre l’ennemi à abandonner la lutte, y compris sans combat, grâce à la ruse, l’espionnage, une grande mobilité et l’adaptation à la stratégie de l’adversaire. Tous ces moyens doivent ainsi être employés afin de s’assurer une victoire au moindre coût (humain, matériel). Il inaugure ainsi la théorie de l’approche indirecte1.

Les idées de L’Art de la guerre ont été reprises et adaptées par différents auteurs pour la stratégie et notamment la stratégie d’entreprise. Dans un sens plus large, L’Art de la guerre peut être interprété comme une méthode de résolution des conflits.

Voyons l’application de ces principes au management.

Conduire ses Troupes : Les Dix Commandements

De la Doctrine et des Institutions
‘La force d’une institution dans ses croyances, ses valeurs communes et ses mœurs.’

On ne mobilise pas une communauté sans de solides convictions assorties d’objectifs clairs et rassembleurs et des institutions compétentes, justes et préparées car, une conquête victorieuse ne peut avoir pour ressort principal qu’une doctrine politique déterminée, raisonnée et maîtrisée.

La doctrine politique fait naître l’unité de pensée ; L’harmonie est la cohésion des valeurs partagées entre la population et ses dirigeants, supérieurs et inférieurs ; elle inspire la confiance de ces derniers à partager un même destin avec leurs chefs dans la vie comme dans la mort.
Ici, le terme ‘doctrine’ peut aussi être interprété par ‘idéologie’ ou ‘force morale’. La force d’une nation se reflète au travers de valeurs communes essentielles au confucianisme teinté de légalisme – telle une colonne vertébrale vertueuse -, partagées par un peuple et ses institutions. Ces valeurs fondamentales sont : « la responsabilité avant la liberté, le devoir avant les droits, la communauté avant l’individu, l’harmonie avant le conflit. » Les concepts suivants illustrent ces valeurs et ces facteurs comme un Tout essentiel à la bonne prédisposition et à la conduite d’une entreprise (engagement-projet). Une maxime illustre ce concept : « Qui a confiance, ni ne craint, ni ne trahit. »

Du Commandement et de l’Organisation interne

Le commandement : extension naturelle du domaine doctrinal dans sa pratique, reflète les qualités essentielles d’une autorité à toutes les échelles de ses institutions dans la gouvernance de ses sujets. Ce sont aussi les cinq vertus confucéennes principales de sagesse, probité, humanité, courage et rigueur. La notion de ‘sévérité’ est le pivot légiste nécessaire dans toute organisation – surtout militaire -, afin d’imposer la discipline collective et le respect par la crainte d’un châtiment.

Il faut entendre par commandement les qualités de sagesse et d’humanité, d’impartialité et de sévérité, de courage et de résolution envers ceux qui nous sont soumis. Vertus essentielles pour l’acquisition desquelles le général et ses commandants ne doivent rien négliger.

Un général habile regarde son armée comme un seul homme qu’il se charge de conduire, car il lui incombe de rassembler ses troupes pour les jeter au cœur du danger. Un maître de guerre réuni ainsi ses troupes parce qu’elles ne peuvent faire autrement.

Une armée peut connaître six infortunes : la fuite, l’insubordination, l’enlisement, l’effondrement, la confusion et la déroute, mais aucun de ces désastres ne peut être attribué à des causes naturelles ; sinon aux seules erreurs de commandement :

Il commande par ignorance des manœuvres d’avance et de recul impraticable ou au moment inopportun ; il trouble l’esprit des officiers et les désoriente en s’imposant dans l’administration des trois armes alors qu’il en ignore tout ; il sème la défiance et démoralise les hommes en cherchant à s’immiscer dans la répartition des rangs, ignorant les compétences et la distribution des responsabilités sans ne rien connaître à l’exercice du commandement.
Lorsque le général est moralement faible et son autorité manque de rigueur, que ses ordres ne sont pas éclairés ou suffisamment précis, ni appuyés par des règles de commandement fermes, l’armée est désorientée et confuse.

De la Méthode : Tactique et Stratégie

Un objectif et 1000 méthodes pour y parvenir. Le Sun Tzu nous apprend à intégrer la relativité de ces deux termes car, face à une crise ou la survenance d’un risque, la ‘grande stratégie’ ploie comme un roseau devant l’urgence d’un impact imminent. Alors une organisation doit faire montre de flexibilité et réadapter ses compétences opérationnelles aux priorités d’urgence. Les compétences managériales doivent évoluer avec les situations.

Il y a déroute quand le général oppose des troupes faibles face à des fortes, des effectifs insuffisants face à des forces importantes ou omet de positionner ses troupes de choc à l’avant-garde.
L’usage judicieux des forces conventionnelles et non-conventionnelles dans leurs emplois combinés d’actions tactiques régulières et subversives, permet aux combattants d’une armée de mieux absorber les chocs adverses et de soutenir sans défaite les attaques ennemies. La connaissance du vide et du plein leur confère, au point d’impact, la force maîtrisée d’une meule écrasant des œufs.
Le stratège maîtrise ces forces et sait user de moyens réguliers et conventionnels au moment de l’engagement et recourir aux forces non-conventionnelles et aux moyens extraordinaires pour remporter la victoire.

De la Psychologie : Du Moral & du Mental des Troupes
Du moral des troupes : les conditions d’unité préservées.

On traverse les épreuves avec l’espoir de jours meilleurs ; crises et menaces, dangers et souffrances sont le prix de la valeur des conditions de paix durables ; encore faut-il savoir motiver ses troupes en gagnant leurs cœurs et en les enflammant d’une ardeur combative.

Un pays dont l’armée est désemparée et traverse une crise de confiance sera victime de tentatives de subversion de la part de ses rivaux. C’est là le sens du proverbe : « la confusion et le désordre dans une armée offre la victoire à l’adversaire. »
Quand, sans avantage stratégique particulier, on combat à un contre dix, il y aura fuite ;
Lorsque les troupes sont fortes et les officiers faibles, il y aura désobéissance et insubordination ;
Lorsque les officiers sont courageux et les troupes inefficaces, l’armée connaît la détresse ;
Le Sun Tzu propose une gouvernance à la fois ferme et souple qui caractérise l’approche confucéenne à la gestion éclairée d’une Nation par son prince : une forme de combinaison raisonnée de bienveillance et de discipline. On peut y ajouter : « Tirez-les promptement de cet état d’assoupissement et de léthargie, donnez-leur des festins, faites-leur entendre le bruit du tambour et des autres instruments militaires. Donnez-leur des occupations, exercez-les, faites-leur faire des évolutions, menez-les même dans des lieux difficiles, où elles aient à travailler et à souffrir. Il faut savoir les charger, mais non pas jusqu’à les accabler ; il faut même les forcer, mais avec discernement et mesure. » Pendant les trêves, on stimule le moral et l’ardeur des troupes en s’assurant qu’elles soient bien nourries et reposées.

De la Discipline : De l’Instruction à l’Exécution

Là où la discipline est la mieux respectée et les instructions les mieux exécutées…

– lorsque les officiers supérieurs sont furieux et insubordonnés et que, face à l’ennemi ils se précipitent aveuglément sans attendre les ordres dans la bataille, sans réfléchir aux conséquences, l’armée s’effondre ;
– S’assurer d’une discipline sans faille ; d’instructions claires et justifiées ; d’ordres efficaces et parfaitement exécutées, afin d’éviter désobéissances et indiscipline car, on instruit les hommes par les institutions civiles, on les unit par la discipline militaire.
– Si vous ne maintenez une exacte discipline dans votre armée, si vous ne punissez pas exactement jusqu’à la moindre faute, vous ne serez bientôt plus respecté, votre autorité même en souffrira, et les châtiments que vous pourrez employer dans la suite, bien loin d’arrêter les fautes, ne serviront qu’à augmenter le nombre des coupables.

Or si vous n’êtes ni craint ni respecté, si vous n’avez qu’une autorité faible, et dont vous ne sauriez vous servir sans danger, comment pourrez-vous être avec honneur à la tête d’une armée ? Comment pourrez-vous vous opposer aux ennemis de l’État ?
De l’Entraînement : le Conditionnement aux Bons Réflexes
La coordination des Corps (signaux – communication), l’entraînement et la logistique (approvisionnements) sont ces ‘détails’ qui jusqu’aux plus petits rouages d’une organisation font souvent toute la différence.

On évalue l’armée la plus puissante par la compétence de ses chefs, les hommes les mieux entraînés et les plus aguerris.
La qualité d’une organisation procède au premier chef des qualités humaines de ses commandants dans la chasse constante à toutes nuisances qualitatives face aux différents types de risques : oubli, déni, indifférence, incompétence, ignorance et négligence. Prévoyance, sécurité et sûreté ne sont pas des coûts intermittents, mais des investissements vitaux pour une collectivité. “They say that nobody is perfect. Then they tell you practice makes perfect. I wish they’d make up their minds.” (Winston S. Churchill)

Des Récompenses et des Châtiments

L’armée qui possède le système de récompenses le plus efficace sait aussi sanctionner avec le plus de discernement.

L’excès de récompenses et de punitions montre que le commandement est au bout de ses ressources, et dans une grande détresse ; si l’armée va même jusqu’à se saborder et briser ses marmites, c’est la preuve qu’elle est aux abois et qu’elle se battra jusqu’à la mort.

En incitant la rage, le général incite ses hommes à commettre des massacres et des destructions inutiles. Préférez l’appât du gain par la promesse de récompenses en les incitant à attaquer l’ennemi pour s’emparer de ses ressources. L’ennemi est ainsi pillé et appauvri par convoitise de ses richesses.
Pour les grands généraux, les usages protocolaires et les codes n’ont guère de place quand il s’agit de dispenser les récompenses à la hauteur des ordres exceptionnels demandés aux hommes au-delà de la discipline ordinaire. La reconnaissance des valeurs est souvent le chaînon manquant de nombre de Dirigeants.

Du Renseignement

On ne se prépare pas sans renseignements préalables…

Être plusieurs années à faire face à des ennemis dont on ignore les desseins et la situation en reportant constamment les actions décisives parce que le général rechigne à accorder les moyens nécessaires à favoriser et recueillir des renseignements, alors ce général est un monstre d’inhumanité qui ne mérite ni de commander une armée ni de seconder son souverain.

L’armée ayant pour elle l’avantage des connaissances des conditions du temps (météorologie) et de l’espace (terrain) les plus favorables pour engager les mouvements et choisir les itinéraires les plus adéquats.

Un Général stratège doit connaître parfaitement le terrain et sa topographie avant d’y conduire son armée ; afin d’en tirer parti au mieux il recourt aux services de guides locaux et d’éclaireurs. Qui néglige un seul de ces points, n’est pas digne de conduire une armée.

C’est en cela qu’on reconnaîtra en vous la puissance dans votre art de créer et d’exploiter chaque configuration tactique en employant les justes forces en qualité et en quantité.

Commencez par vous mettre au fait de tout ce qui concerne les ennemis ; sachez exactement tous les rapports qu’ils peuvent avoir, leurs liaisons et leurs intérêts réciproques ; n’épargnez pas les grandes sommes d’argent ; n’ayez pas plus de regret à celui que vous ferez passer chez l’étranger, soit pour vous faire des agents locaux, soit pour vous procurer des connaissances exactes, qu’à celui que vous emploierez pour la paie de ceux qui sont enrôlés sous vos étendards : plus vous dépenserez, plus vous gagnerez ; c’est un argent que vous placez pour en retirer un gros intérêt.
De l’Anticipation : Préparer
« … vous ne formerez aucune entreprise, sans la conduire à une heureuse fin. Vous verrez ce qui sera loin de vous comme ce qui se passera sous vos yeux, & ce qui se passera sous vos yeux, comme ce qui en est le plus éloigné. » (Amiot)

Lors des préparations avant l’ouverture des hostilités, les calculs et supputations laissent présager une victoire quand les avantages sont réunis ; dans le cas contraire, la défaite est envisageable. En se livrant à de nombreux calculs, on peut ainsi réduire ses marges d’erreur et consolider ses chances de victoire. Qui les néglige, s’engage en terrain inconnu et réduit ses chances d’autant. C’est par ces considérations qu’il faut examiner la situation, et l’issue apparaîtra clairement.

Une armée victorieuse remporte l’avantage avant même d’avoir cherché la bataille ; une armée est vouée à la défaite si elle cherche la bataille avant de vaincre.

Savoir être prévoyant et savoir correctement estimer la situation en concentrant ses forces pour attirer à soi vos adversaires au moment propice et à l’endroit voulu.
Des Vertus et des Qualités d’un Commandement
Toutes les vertus n’ont qu’un seul but : créer les conditions favorables d’une confiance absolue entre commandants et commandés afin de guider une armée telle un seul homme ; le général incarne ainsi à la fois les fonctions de guide suprême et maître d’oeuvre des conditions de la victoire. Sa première vertu est probablement celle de l’humilité en ne sous-estimant jamais son adversaire.

En matière martiale, le grand nombre seul ne confère pas l’avantage ; n’avancez jamais en comptant sur la seule puissance militaire. Une armée composée des mêmes hommes peut être très méprisable commandée par tel général, tandis qu’elle sera invincible commandée par tel autre.

C’est pourquoi un habile commandant recherche la victoire en tenant compte de la situation et ne l’exige pas de ses subordonnés. Il sait ainsi en fonction des dispositions, choisir ses meilleurs hommes afin de tirer parti de la situation. Un habile commandant tient compte de la situation et sait employer ses hommes au combat avec les mêmes lois physiques qui s’appliquent à la puissance croissante de pierres rondes ou de billes de bois dévalant les pentes abruptes des sommets d’une montagne.

En Conclusion :

De ces dix commandements, un commandant qui n’entend pas appliquer ces connaissances sera régulièrement vaincu.

Telles sont les attentions que vous devez à toutes les démarches, tant les vôtres que celles de vos adversaires. Une telle minutie dans les détails peut paraître superflue, mais elle procède d’un constat : que rien de tout ce qui peut contribuer à vous faire triompher n’est négligeable.
En matière de Management de crise et de Gestion des risques, préparez-vous à ne jamais laisser le diable s’emparer des détails…

Les probabilités n’existent pas… mais on vous explique quand même comment vous en servir

Un excellent article publié sur The Conversation :

Nous devons chaque jour, dans notre vie personnelle ou professionnelle, prendre des décisions tout en n’ayant qu’une connaissance partielle des informations relatives à la situation : si je choisis cet itinéraire, vais-je me retrouver bloqué dans un embouteillage et arriver en retard ? Dans quelle station-service sur ma route le carburant sera-t-il le moins cher ? Ce chapitre du programme que je n’ai pas encore révisé a-t-il des chances de tomber à l’examen ?

Les exemples sont innombrables où, consciemment ou non, nous parions quotidiennement sur des événements dont nous ne savons pas s’ils vont se réaliser ou non. Dans de telles situations, nous ne pouvons donc pas être certains de faire le bon choix : au final, le résultat relèvera aussi du hasard. Malgré cette part d’incertitude, il nous faut tenter d’optimiser nos chances de succès, et cela passe par le calcul ou l’estimation de la probabilité des événements incertains. Cette probabilité est un nombre entre 0 et 1, d’autant plus proche de 1 que l’événement a des chances de se produire. Mais quels sont les mécanismes mis en jeu dans le calcul de ce nombre ?

Le mathématicien Bruno de Finetti (1906-1985) a passé sa vie à étudier la théorie des probabilités, dont il était un grand spécialiste. Pourtant il clame dans un ouvrage qui leur est consacré que « Les probabilités n’existent pas ! »

Voilà qui commence mal : comment pouvons-nous mettre en pratique la théorie de quelque chose qui n’existe pas ? En fait, par cette provocation, de Finetti voulait souligner que la probabilité d’un événement n’est pas une réalité objective : elle dépend de la personne qui l’estime et évolue en fonction des informations que celle-ci reçoit. Voyons cela concrètement sur un exemple.

Le « problème de Monty Hall »

Le « problème de Monty Hall » se présente sous la forme d’un jeu de hasard inspiré de l’émission télévisée américaine Let’s make a deal (dont Monty Hall était le présentateur). Le candidat a devant lui trois portes fermées, notées A, B, C, derrière lesquelles sont cachées deux chèvres et une voiture réparties au hasard. Son but est de trouver la porte dissimulant la voiture. Il commence par désigner l’une des trois portes, sans l’ouvrir (disons que c’est la porte A). Le présentateur, qui connaît la répartition, annonce alors qu’il va montrer une chèvre cachée derrière l’une des deux autres portes (c’est toujours possible : puisqu’il n’y a qu’une voiture, au moins une des deux autres portes cache une chèvre). Après avoir ainsi dévoilé une chèvre (disons derrière la porte B), il demande au candidat si celui-ci maintient son choix initial, ou si il préfère aller vers l’autre porte encore fermée (la porte C dans notre exemple). À votre avis, le candidat a-t-il intérêt à changer de porte ?

Au départ du jeu, le candidat ne sait strictement rien sur la position de la voiture et des deux chèvres. Lorsqu’il choisit sa première porte, il a donc une chance sur trois d’avoir choisi celle qui cache la voiture. Mais en montrant la chèvre derrière la porte B, le présentateur apporte une nouvelle information au candidat : ce dernier, qui ignorait tout au début, sait maintenant que la porte B dissimulait une chèvre. En quoi cette nouvelle donnée pourrait-elle l’amener à réviser son choix initial ?

À ce point deux raisonnements s’opposent qui aboutissent à deux conclusions contradictoires. Voici la première façon d’aborder le problème : il reste deux portes fermées, A et C, l’une cache une chèvre et l’autre une voiture. Il y a alors une chance sur deux que la voiture soit derrière la porte A, et donc le candidat aurait autant de chances de gagner en gardant la porte A qu’en choisissant la C. Mais le second raisonnement consiste à remarquer que la voiture n’a pas changé de place depuis le début du jeu. Comme il y avait une chance sur trois qu’elle soit derrière la porte A, elle a maintenant deux chances sur trois d’être cachée derrière la porte C. Selon ce second raisonnement, le candidat doublerait ses chances de gagner en changeant de porte. Quel est parmi ces deux arguments celui qui fournit la bonne stratégie pour le candidat ?

On trouve très facilement en ligne des simulations du jeu, et nous l’avons expérimenté en situation réelle lors de la Fête de la Science avec un grand nombre de visiteurs. Les résultats sont sans appel : lorsque le candidat conserve la porte qu’il avait choisie initialement, il gagne environ dans 33 % des cas, alors que la stratégie de changer de porte aboutit à environ 66 % de succès. C’est donc bien le second raisonnement qui semble être correct. Mais alors, qu’est-ce qui cloche dans le premier ?

Ndlr : Vive les émissions de jeux américaines !

La suite sur :

Les probabilités n’existent pas… mais on vous explique quand même comment vous en servir
Publié sur The Conversation le 20 juin 2021.

Les maths existaient-elles déjà dans la nature bien avant l’être humain?

Un petit texte pour réfléchir (un peu) :

L’œuf ou la poule? Les maths ou l’humain? Il semblerait que les premières précèdent le second.

Généralement, les maths sont perçues comme un outil créé par l’être humain pour mieux décrire son environnement ou construire sa table IKEA un dimanche après-midi pluvieux. Mais pour certains, les mathématiques constituent préalablement notre monde, ce sont des règles simples que la nature suit. «Si les mathématiques expliquent tant de choses que nous voyons autour de nous, alors il est peu probable que les mathématiques soient quelque chose que nous avons créé», avance le philosophe Sam Baron de l’Australian Catholic University.

C’est ce que pensait également Pythagore (vers 575-475 avant J.-C.). Le philosophe grec fut le premier à identifier les mathématiques comme l’un des deux langages pouvant expliquer l’architecture de la nature –l’autre étant la musique. En tout cas 2.000 ans plus tard, cette théorie anime toujours les scientifiques qui tentent de découvrir et d’expliquer les modèles mathématiques qui apparaissent dans la nature.

L’article complet : Les maths existaient-elles déjà dans la nature bien avant l’être humain?
Publié sur Slate le 6 janvier 2022 par Juliette Soudarin